Carte.
 

Mystères, curiosités et lieux secrets.

Un mur énigmatique.

 

 

Nous allons visiter une zone repérée sur une photo aérienne et qui semble présenter une anomalie géologique.

Le site en question se situe dans le nord de la Bardena Negra, il s’agit d’une haute colline tabulaire aux versants très pentus et ne présentant aucune voie commode pour se rendre à son sommet. Le nom de cette colline : Cabezo de la Cruz del Pelotero.

Ce jour là, le temps est nuageux, froid et très venteux. Jose Mari et moi-même arrivons par le plateau d’en face, situé à 300 mètres au sud-ouest.

Objectif : descendre à pied la pente de ce plateau, puis accéder au sommet de la Cruz del Pelotero en improvisant un itinéraire au milieu d’un dédale de pierres et de gravas.

La pente est très raide, les cailloux roulent sous nos pieds, le vent souffle par violentes rafales. Assurément, le jour de cette petite expédition est mal choisi.

Qu’importe, nous arrivons finalement au sommet et pouvons commencer nos investigations.

Sur la vue aérienne, donc, nous avions repéré une anomalie géologique et nous nous doutions bien que cette anomalie n’avait rien de naturel.

Ce que nous cherchons est une sorte de long mur parfaitement rectiligne et s’étirant sur toute la largeur du plateau. Nous le découvrons assez rapidement, il s’élève modestement au-dessus de la végétation et il ne fait plus aucun doute qu’il s’agit d’une construction réalisée par l’homme.

Sur ce haut plateau, nous cherchons aussi autre chose : ce qui pourrait être une sorte de fosse et que nous avions également repéré sur la vue aérienne. Malgré une végétation basse mais très abondante, nous trouvons la fosse en question.

Voici en images ce que nous avons découvert en ces lieux, et ce que nous pouvons en tirer comme conclusions :

 

Vue aérienne du site.

Le Cabezo de la Cruz del Pelotero est une colline au sommet plat dominant les terres alentours de 70 à 130 mètres.

Le plateau a une longueur de 433 mètres pour 90 mètres sur sa plus grande largeur.

Cartographie.

 

Extrémité du plateau.

La zone qui nous intéresse, à l’extrémité nord-ouest, a un périmètre d’environ 223 mètres.

Nous constatons la présence d’un mur, d’une fosse et d’une bordure de plateau assez évasée.

Cartographie 2.

 

Photo du cabezo.
Le Cabezo de la Cruz del Pelotero.

 

Le mur de pierres.

Le mur n’est en fait qu’un amas de terre et de pierres (pour ce que l’on peut en voir aujourd’hui), il s’étend sur toute la largeur du plateau et mesure approximativement 70 mètres de long, 2,5 à 3 mètres de large, et a une hauteur qui n’excède pas 1,5 mètre.

Le mur.
 
Vestiges d'une habitation ?

Vers le centre, collé contre le bord sud-est du mur, nous trouvons les vestiges d’un petit mur fait de pierres sèches.

Fred Moncoqut.

 

Bordure évasée.

La bordure du plateau est évasée. Peut-être est-ce dû à une érosion naturelle du plateau, mais je n’ai pas le souvenir d’avoir déjà observé ceci ailleurs dans les Bardenas.

 

Abondante végétation.

Sur la vue aérienne, la fosse présente grossièrement la forme d’un trapèze mesurant 15m/21m/18m/19m, soit un périmètre de 75 mètres. Sur place, trouver cette fosse fut assez aisé bien qu'elle soit occupée par une abondante végétation. Les contours sont toutefois très difficiles à repérer, on ne peut que les deviner.

Végétation.

 

La fosse.

Cette fosse est entièrement occupée par une abondante végétation qui nous empêche de trouver des signes d’une ancienne présence humaine.
Toutefois, sur la bordure nord, nous découvrons des morceaux de poteries éparpillés ici et là. L’un des morceaux conserve même du vernis d’époque !

 

Poterie 1
Poterie 2
Poterie 3
Poterie 4
Poterie 5
Poterie 6

 

Que pouvons-nous conclure des ces observations ?

Le site est probablement très ancien.

Le mur peut avoir eu diverses fonctions : il pouvait s’agir d’une protection contre le vent (particulièrement violent en ce lieu), ou bien ce mur aurait pu être une ancienne fortification destinée à se protéger des forces ennemies.

Dans l’hypothèse qu’il s’agisse d’un site fortifié, la bordure évasée du plateau était peut-être surmontée d’un mur de protection secondaire, venant ainsi compléter la fonction défensive du mur principal. Ce dernier était d’ailleurs très probablement plus haut et plus fonctionnel qu’il ne l’est aujourd’hui.

A l’intérieure de l’enceinte, il devait assurément y avoir des habitations (vestiges impossible à déceler aujourd’hui en raison de l’abondante végétation). La présence de poteries atteste qu’il y avait en ce lieu une présence humaine régulière et durable. La fosse était peut-être un réservoir d’eau, ou bien les habitations y étaient construites afin d’y être abritées du vent.

Quel type de personnes pouvait bien vivre ici ?

Le sommet de cette colline ne peut intéresser que deux catégories de personnages : les bandits (autrefois très nombreux dans les Bardenas), et les soldats de l’armée royale (qui surveillaient la frontière Navarre-Aragon tout en réprimant le banditisme).

Ce haut plateau est difficilement accessible, ce qui constitue une très bonne défense naturelle, et il s’agit d’un nid d’aigle idéal pour l’observation des terres environnantes.

Vue depuis le sommet.
Du haut de cette colline, la vue porte à plusieurs kilomètres.

La seule construction du mur constitue un travail de titan difficilement attribuable à des bandits, aussi bien organisés soient-ils. La main d’œuvre devait être assez importante et il est plus sérieux de l’attribuer à l’armée royale.

La construction d’un tel mur implique aussi une occupation du site à long terme (nous ne pouvons pas parler de campement, mais plutôt d’une véritable occupation du site).

 

En conclusion :

A priori, le site de Cruz del Pelotero ne figure dans un aucun document archéologique. Donc, en l’absence de fouilles réalisées par des professionnels, nous ne pouvons émettre que des hypothèses, la plus séduisante étant que cette colline fut un ancien site fortifié occupé par des soldats de l’armée Royale de Navarre.

Il est à noter qu’il existe dans les Bardenas de nombreux sites fortifiés parfaitement identifiés (Peñaflor, Sanchicorrota, Fraile Alto, Estaca, Mirapex, Aguilar, et Santa Margarita). Tous sont situés sur des hauteurs, ils avaient pour fonction de surveiller la frontière Navarre-Aragon ainsi que de réprimer le banditisme.

 

Photographies : Jose Maria Samanes et Frédéric Moncoqut.
Texte : Frédéric Moncoqut.

 

 

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