Alberto Guallart Resa, portrait d’un Bardenero.
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De par leur profession, certains hommes ont une affection toute particulière pour les Bardenas, une affection exclusive et quasi-fusionnelle. Alberto Guallart Resa est de ceux-là, il fut berger sur cette terre aride durant dix-neuf ans !
La famille d’Alberto est originaire d’Esco, un petit village situé en bordure du grand lac de Yesa (Pyrénées aragonaises). Son grand-père pratiquait autrefois l’élevage ovin et bovin, mais son père préféra le mouton qu’il alla élever avec l’un de ses frères au sud de la Navarre, à Arguedas.
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Les deux frères rencontrèrent leurs épouses dans ce même village, à la suite de quoi ils décidèrent de travailler chacun de leur coté. Le troupeau fut donc divisé en deux. |
Alberto est né le 06 mai 1971 à Tudela, mais c’est bien à Arguedas qu’il vit depuis son plus jeune âge.
Fils cadet d’une famille comportant quatre enfants, Alberto s’imprégna très tôt de l’élevage en grandissant parmi les brebis, car à cette époque la maison familiale se situait dans la bergerie.
Alberto garde de très bons souvenirs de son enfance, il se souvient par exemple que ses parents organisaient chaque dimanche un repas festif dans la cours de la maison, quelques amis étaient systématiquement conviés à ce festin durant lequel on pouvait déguster des migas et de la viande cuite au barbecue. |
Alberto se rappelle aussi qu’il aimait s’amuser avec les agneaux et les chiots, et bien souvent il passait des journées entières à courir ici et là dans les Bardenas. Il fut très tôt marqué par l’environnement bardenero ! En ce temps ses frères s’occupaient déjà du bétail, mais lui était encore trop jeune.
A 14 ans il quitta l’école pour prêter main forte à son père et à ses frères.
Le troupeau devenait chaque année plus important et le travail ne manquait pas. Parallèlement, la famille ouvrit une boucherie dans le village afin d’y vendre la viande issue de leur bétail.
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Alberto faisait souvent paître les brebis dans le secteur de "Aguilares", non loin de l’actuel Centre d’Information Touristique. En 1987, alors qu’il n’avait que 16 ans, il se souvient avoir vu passer près de lui l’autobus qui transportait les chanteurs du groupe heavy métal Helloween. Cette année là, le groupe était venu dans les Bardenas afin d’y réaliser le clip vidéo de leur chanson "I want out" ! Alberto était déjà un grand fan de ce type de musique, et c’est tout naturellement qu’il se rendit à Pampelune pour assister au concert d’Halloween !
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Paysage printanier dans les Bardenas. |
Le métier de berger impose beaucoup de travail et de sacrifices. Il est souvent difficile et éreintant de s’occuper de plusieurs centaines de brebis ! Il faut les nourrir, les soigner, les tondre, chaque jour il faut les faire paître et en fin de journée il faut les parquer pour la nuit, il faut aussi avoir une attention particulière pour les brebis en gestation puis pour les agneaux qui se comptent alors par dizaines.
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Alberto, dans la bergerie. |
Tonte des brebis. |
Dans les Bardenas la vie de berger est rude, le climat en est l’une des principales causes : Durant l’automne il faut supporter la pluie, et en hiver le froid s’invite accompagné d’un vent constant qui fouette le visage à longueur de journée ! Parfois, bien que rarement, il arrive que la neige fasse son apparition. Le printemps sonne comme une trêve, l’ensoleillement journalier est plus long et permet aux brebis de paître plus longtemps, de plus les herbages sont en cette saison très abondants ! Puis vient l’été, probablement la pire saison ! La chaleur, souvent caniculaire, est toujours difficile à supporter. Dans les Bardenas l’ombre est un luxe rare, une pause s’impose donc durant les heures les plus chaudes : retour à la maison aussitôt suivi d’une douche rafraichissante, ensuite un bon repas, et enfin une longue sieste jusqu’à cinq heures de l’après-midi. Après quoi, il faut repartir au travail sous un soleil toujours aussi brûlant !
Parfois de belles et impressionnantes tempêtes s’abattent sur les Bardenas. Dans la région les orages sont d’une puissance incroyable ! Alberto se souvient qu’un jour la foudre est tombée à moins de 200 mètres de lui, il eut le sentiment que le sol se fendait sous ses pieds et le fracas assourdissant du tonnerre a paniqué ses brebis, devenues comme folles !
Alberto tient aussi à souligner l’importance du chien de berger, car un berger sans chien n’est rien. Il commandait ses braves compagnons de travail par des sifflements, chaque sifflement étant différent des autres et signifiant un ordre bien particulier. |
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Alberto contemple les Bardenas. Photographie prise en 2001 à Aguilares par Frédéric Moncoqut. |
La vie de berger est aussi une vie de solitude, il peut se passer des journées entières sans qu’Alberto n’ait personne à qui parler. Pour tromper l’ennui il écoutait fréquemment la radio et lisait des livres, Alberto appréciait particulièrement ces moments durant le printemps, lorsque le paysage était verdoyant et le climat si agréable.
Alberto garde des souvenirs émus de ses dix-neuf années passées quotidiennement dans les Bardenas, 365 jours par ans ! Depuis les hauteurs d’Aguilares il pouvait contempler une nature belle et omniprésente et il assistait chaque jour à de somptueux levers et couchers de soleil. Il y avait aussi le passage de plus en plus fréquent des touristes, certains venaient même le prendre en photo avec ses brebis !
Un jour, les circonstances de la vie imposèrent à Alberto l’abandon son activité de berger. En 2004 il vendit la totalité de son bétail puis il alla prêter main forte à l’un de ses frères qui tenait un commerce à Arguedas, une superette nommée « Supermercado Guallar Murillo » et qui se situe encore aujourd’hui juste en face de la mairie. Ce commerce est très apprécié dans le village car on y trouve des produits de grandes qualité (fruits, poissons, charcuterie, fromages, vins de Navarre et de la Rioja, une grande variété de biscuits, de pâtisseries et de yaourts, ainsi que tout ce que l’on peut trouver dans une superette traditionnelle).
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Malgré cette nouvelle vie, Alberto n’a jamais tourné le dos au passé. Il dispose maintenant de beaucoup plus de temps pour vivre pleinement ses passions et il se rend régulièrement dans les Bardenas pour y retrouver ses repères, car la Bardena l’a marqué à jamais, elle fait parti de sa vie et de son être.
Comme il le dit lui-même, "C’est un appel de l’esprit, chaque fois qu’il y a une pleine lune je me rends dans la Bardena pour m’adonner à la contemplation, c’est un rituel de l’harmonie de la terre avec l’univers, c’est quelque chose de précieux, c’est différent à chaque fois, je découvre de nouvelles sensations."
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Alberto n’est plus berger, mais sa passion pour les Bardenas reste exclusive. |
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Texte rédigé en février 2014
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